On prend son souffle et on prononce le nom du groupe: …And You Will Know Us by the Trail of Dead. Les Texans ont publié le 20 octobre leur dernier opus IX. Et on l’a écouté, sans relâche.
Appeler un album IX force le respect. Et la postérité ? On pense forcément à Led Zeppelin I, II, III et IV et Queen II… Un mot sur la pochette: épique. Ensuite il y a ce nom – toujours trop long – …And You Will Know Us by the Trail of Dead, qui impressionne autant qu’il refroidit. Et annonce d’emblée la couleur: la bande à Conrad Keely ne fait pas dans la simplicité. Au fil des efforts, c’est même devenu une marque de fabrique. Conrad Keely est un dramaturge. Son rock est théâtral. Il occupe tout l’espace avec une intensité musicale inédite. Nappes d’instruments et de mélodies, envolées rythmiques et variation des tempos: le groupe d’Austin, Texas, est devenu maître dans l’art d’orchestrer un morceau. Avec ses faux airs brit pop, le chant ne laisse pas indifférent non plus. Pour l’oreille néophyte, il peut être trop aigu, un brin juvénile et parfois nasillard. A la première écoute, un disque de …And You Will Know Us by the Trail of Dead est loin d’être évident. Dans la tourmente, il s’apprivoise.
Injustement critiqué, l’album Worlds Apart paru en 2004, démontrait déjà l’ambition des musiciens: faire un rock noisy-pop à la fois fluide et audacieux. Qui n’a pas été marqué par le titre Will you smile for me again ? Pièce maîtresse dans la discographie de …And You Will Know Us by the Trail of Dead.
Pas question pour autant de résumer le groupe à un titre en particulier car un album de …And You Will Know Us by the Trail of Dead respire sans relâche du début à la fin. Et si le disque Worlds Apart est évoqué, c’est parce que ce IX dégage la même vitalité.
Alors pas de surprise pour ce 9e opus dont le nom IX fait référence à la planète imaginaire du monde de Dune. On attend de …And You Will Know Us by the Trail of Dead de faire du …And You Will Know Us by the Trail of Dead. L’entrée en matière avec The Doomsday Book nous propulse en terrain connu. Fort de cet élan, on savoure mieux le lancinant et martial Jaded Apostles. Avec ses relents post-punk, il ouvre la voie à Million Random: déferlement mélodico-rythmique. Vous venez d’être happé par IX , bon voyage, on se retrouve à l’issue de la 11e plage.
Parmi les pépites du disque, l’envoûtant Lie Without A Liar. Les arpèges de guitares sont exquis. Et, sous tambour battant, le refrain entêtant. Avec ses touches de piano, The Ghost Within nous ballade, nous emballe. Le tubesque The Dragonfly Queen nous réconcilie avec la pop. Le groupe démontre encore une fois son aisance dans les formats longs et aux climats changeants, à l’instar de Lost In The Grand Scheme et ses 7’26 au cours desquels l’ennui jamais ne prend.
Là où …And You Will Know Us by the Trail of Dead impressionne, c’est avec ses morceaux instrumentaux à ne sauter sous aucun prétexte. How to Avoid Huge Ships et Like Summer Tempests Came His Tears donnent du relief à ce IX, de l’éclat aux titres qu’ils précèdent, car …And You Will Know Us by the Trail of Dead conçoit ses disques comme un voyage sans escale. Bien plus encore, IX n’échappe pas à la règle: magistral.
Jérémy Lynx